jeudi 30 juin 2016

Le passeport périmé (1)

 
Pour faire passer l'été, je vous propose un petit feuilleton. Vous pourrez intervenir, participer à un sondage, donner des options dans les commentaires (je les ajouterai au sondage).
 
 
 
Le passeport périmé
 
 
« Mon passeport est périmé ? Vous êtes sûr ? Ce n’est pas possible, il n’a pas déjà dix ans. Vérifiez, j’ai raison, regardez, il est de 2008.
- Non Madame, il est de 2003.
- Mais laissez-moi passer, je suis avec ce groupe.
- Impossible, vous ne pouvez pas passer, il faut rentrer chez vous.
- Faites quelque chose, dites-moi comment je peux faire pour partir.
- Il n’y a pas de solution, et mettez-vous de côté, avec tous les soucis techniques nous avons pris du retard.
 
J’eus beau discuter, insister, solliciter, rien n’y fit. J’étais encore en train de négocier que l’avion décollait. Et comme j’avais pris un billet de groupe, il était impossible de décaler mon vol. Je me trouvai totalement désappointée lorsque je m’aperçue que tout mon groupe était parti sans moi, indifférent à mes soucis. Pourtant c’est moi qui avais tout organisé pour notre bande d’amis.
 
Je me trouvai dans un immense hall d’aéroport, la valise à mes pieds, mon passeport à la main. Je regardai incrédule les horaires de départ défiler sous mes yeux. Je ne sais combien de temps je restai ainsi, immobile, mais d’un coup, dans ce hall devenu désert, je fus violemment bousculée par deux jeunes filles. Je ne les avais pas vues venir. Elles me prirent toutes deux par un bras et me dirent : « Allez, vite, nous allons être en retard ». Je n’eus que le temps de dégager un bras pour saisir la poignée de ma valise. Je fus littéralement emportée dans leur mouvement.
 
 
A vous, lecteur, de décider du destin de la demoiselle.

 
 

mercredi 29 juin 2016

Il prend son nouveau rythme

Ce qui est bien en Suisse, c'est que les enseignants sont sensibles à la prise de nouveaux rythmes des enfants : tout se fait en douceur.
 
Ambroise termine son année scolaire vendredi prochain. La semaine dernière, il y a eu les examens de fin d'année. Cette semaine-ci est réservée au sport, sports collectifs, piscine, balade (appelée "course d'école", mais on ne court pas, on marche 15 km minimum). Il a cours à mi-temps, parfois le matin, parfois l'après-midi.
 
Je pense que ce rythme allégé doit permettre de faire une transition entre une année scolaire riche, et des vacances. Il faut habituer le corps à une vie plus douce et plus tranquille...
 
 
 

lundi 27 juin 2016

Un tableau, une histoire (15)


sharon jayne allicotti Mojave Rain Pool

"Hector, veuillez vous arrêter ici, je vous prie".
 
Le chauffeur arrêta la voiture au bord de la route et coupa le moteur. Il n'avait reçu qu'une seule consigne de son patron : répondre à tous les désidératas d'Hubert. Pourtant, dans sa simplicité, il ne comprenait pas ce choix. Lui aurait continué à vivre normalement, et aurait incité son propre fils à faire de même. Mais le patron est le patron, il ne lui appartenait pas de le juger. Quand même, c'était curieux toute cette histoire. Lorsqu'Hubert était rentré de pensionnat, il se portait bien. Quasiment du jour au lendemain il se trouva abattu. Des examens médicaux, une batterie d'examens médicaux avaient diagnostiqué une maladie si grave que les médecins ne lui donnaient plus que quelques semaines de vie. De ce jour, la patron, complètement dérouté, avait donné carte blanche à son fils Hubert.
 
Hector essuya son front : il faisait chaud, et avec le moteur coupé et la porte arrière ouverte, il dégoulinait. C'est à ce moment-là qu'il réalisa qu'Hubert avait quitté la voiture. Il se retourna, vit la cravate et le chapeau sur le siège, le pantalon et la chemise derrière le siège passager, et les grosses bottes derrière son siège. Que se passait-il ? Et si Hubert avait sauté ? Et si... Brutalement Hector se mit à transpirer encore plus fort, mais cette fois c'était de frayeur et non plus seulement de chaleur. Hubert aurait-il voulu en finir avec cette vie et sauter dans le ravin ?
 
Hector n'osait pas regarder sur sa gauche. Pourtant il le fallait bien, il faudrait bien récupérer le corps et tout expliquer au patron. Il prit sa respiration, ouvrit la porte, sortit, et regarda vers le bas. Il ne vit rien. Forcément, avec tous ces rochers, il était impossible de découvrir un corps disloqué. Il scruta chaque recoin, tremblant de tous ses membres. C'est alors qu'il vit un petit animal bouger, sauter, puis courir. Ce n'était pas un animal, c'était un homme, c'était Hubert. Il courait vers le lac. Hector respira de soulagement, il failli en perdre l'équilibre.
 
Hubert se retourna, héla Hector : "Ohé, venez nager avec moi, je suis sûr que ce sera agréable". Hector fit non de la tête, il retourna s'asseoir dans la voiture, prit son journal et se plongea dans les faits-divers.
 
 
Ecrit sur une suggestion de Lakevio


jeudi 23 juin 2016

Le voyageur immobile


-          Madame, excusez-moi, mais que faites-vous, où allez-vous ?

-          J’ai rendez-vous avec Monsieur Emile Sigmind.

-          Et ces valises ?

-          Oh, mais c’est pour le voyage de Monsieur Sigmind.

-          Enfin, Madame, mais vous savez bien, Monsieur Sigmind ne peut plus voyager, il ne peut plus quitter son lit. Restez où vous êtes, je vais chercher le Directeur.

Pendant que l’infirmière courait à la recherche du chef d’établissement, Estelle se précipitait dans la chambre de son ami Emile Sigmind. « Emile, c’est moi, Estelle. Etes-vous prêt pour votre voyage ? » Sans attendre la réponse qu’il ne pouvait plus donner, elle se pencha pour lui faire la bise. Elle avait pris l’habitude d’interpréter les pensées d’Emile et de les formuler. Elle le regardait alors pour voir s’il était d’accord avec sa supposition, puis continuait son monologue-dialogue. Après le drame qui avait touché Estelle, elle avait décidé d’adopter un de ses voisins. Elle était entrée dans la maison de retraite située en face de son immeuble, avait choisi un résident agréable, et venait régulièrement lui rendre visite et l’égayer. Au fil des mois, la santé d’Emile déclinait, mais Estelle, avec sa joie et sa verve, parlait pour deux pour le plus grand plaisir d’Emile. Le jour où il ne put plus se lever, Estelle prit une décision : « Emile, vous m’avez dit un jour que vous auriez aimé visiter l’Inde mais que c’était trop tard. Moi je vous dis que rien n’est jamais trop tard, et que la semaine prochaine je vous emmènerai en Inde. » Au sourire d’Emile, Estelle sut qu’elle avait touché juste. « Ce sera un voyage un peu particulier, vous irez en Inde sans quitter votre lit, mais je suis sûre que vous allez a-do-rer ».

Ce jour-là, donc, elle était entrée dans sa chambre avec une énorme valise à roulettes. Emile la regardait avec attention, l’œil un peu pétillant. Il savait qu’il pouvait s’attendre à tout avec Estelle, elle n’était jamais à bout de surprises. Elle coucha la valise sur le sol, en retira un ordinateur, un projecteur, installa le tout sur la table d’appoint à côté du lit. Elle ajouta un plat recouvert. Elle décrocha délicatement les tableaux et les posa sur le bureau, puis elle ferma les rideaux pour assombrir la pièce. « Emile, puis-je vous redresser un peu ? Voilà, ainsi c’est parfait. Mais dites-moi, ne m’aviez-vous pas dit que vous ne partiriez jamais sans votre plante verte ? » Elle prit la plante, et la posa dans les bras d’Emile qui souriait d’aise. Elle inséra un DVD dans l’ordinateur et alluma le projecteur. « C’est l’Himalaya. Quelle majesté… »

A ce moment-là, la porte s’ouvrit à toute volée : « Monsieur le Directeur, cette folle veut emmener Monsieur Sigmind en Inde. Regardez, la valise vide posée sur le sol. C’est quoi ces volets fermés. Mais c’est quoi ce bazar ? » Le Directeur entra à son tour et inspecta les lieux. Il regarda Estelle et Emile. « J’avoue ne rien comprendre. Quels sont vos objectifs ? » Il parlait d’un ton très doux, il avait manifestement compris qu’Estelle n’envisageait pas de partir avec Emile. Dans un grand sourire, Estelle lui dit qu’ils étaient en Inde, qu’ils admiraient l’Everest et qu’ils aimeraient poursuivre leur voyage. Le Directeur sourit, tapota la main d’Emile en lui disant « Quelle chance vous avez de faire un si beau périple, je vous envie beaucoup ». L’infirmière se frappa le front en entendant ces mots et sortit en grommelant.

Estelle qui s’était levée, se rassit à côté d’Emile, et remit le film en marche. Les paysages étaient grandioses, tous plus saisissants les uns que les autres. Emile prit la main d’Estelle et la serra. C’était son moyen à lui de la remercier. Ils traversèrent ainsi des vallées profondes, marchèrent sur des sentiers escarpés qui donnaient le vertige et beaucoup de frayeurs, chaque pas pouvant entraîner une chute brutale dans le ravin. Il fallait suivre le mulet qui marchait devant, et mettre ses pas là où il avait posé ses sabots. C’était la consigne du guide. Pendant la pause, tout le monde s’assit sur une pierre. Estelle ouvrit le couvercle de son plat et en sortit des cheese-naans et des lentilles au curry. Emile se régala. Cela faisait si longtemps qu’il n’avait mangé un plat aussi délectable. Il ferma les yeux pour sentir les épices parfumer son palais. Maintenant il se sentait bien dans ce cirque majestueux. Le petit souffle d’air frais lui permettait de reprendre des forces, parce qu’il faudrait poursuivre la  route pour arriver au campement avant le soir. Lorsqu’il ouvrit les yeux, Estelle le regardait. Il lui sourit et murmura « C’était si bon, ce voyage est fantastique ». Il avait parlé. Estelle en fut remuée. Elle remit le DVD en marche pour qu’ils puissent poursuivre leur promenade à travers les montagnes enneigées.

Lorsque le documentaire prit fin, Estelle installa Emile confortablement. Elle ne l’avait jamais vu aussi heureux. Elle rangea ses affaires, replaça le pot de fleur sur le rebord de fenêtre et lui dit : « A demain Emile, nous aurons une rude journée demain. Après un court vol d’avion, nous irons à New Delhi. Dormez bien ! »

Elle sortit de la pièce, ferma doucement la porte. Emile avait fermé les yeux, Estelle savait qu’il se remémorait tout le voyage qu’ils venaient de faire. Elle croisa l’infirmière et lui dit juste avant la fermeture des portes de l’ascenseur : « Emile n’aura pas faim ce soir, nous avons soupé ensemble ». Les portes se fermèrent, Estelle éclata de rire.

Le lendemain elle croisa le Directeur en arrivant : « Bonjour Madame, je vous guettais. Je voulais vous féliciter pour votre initiative. Je suis allé voir Emile hier soir, il m’a dit dans un souffle « Je suis heureux ». Avez-vous bien perçu quelle somme de bonheur vous lui apportez ? » Estelle lui répondit que le voyage n’était pas fini, que le programme prévoyait dix jours de visites.

Lorsqu’elle entra dans la chambre, Emile reposait sur ses oreillers, le lit un peu élevé. Il se portait manifestement bien mieux que la veille. Estelle installa son matériel, donna la plante à Emile, s’assit sur le lit, et les voilà à New Dehli. Les jours suivants ils allèrent dans tous les coins de l’Inde, pour voir les éléphants, les temples, le Gange, Bombay et Calcutta. Estelle avait donné une carte de l’Inde à Emile pour qu’il arrive à situer les lieux. Ils allèrent du nord au sud, d’est en ouest pour repartir au nord, sans aucune logique, c’était leur richesse. Tous les jours, Estelle apportait le déjeuner aux goûts et aux saveurs de l’Inde. Emile mangeait chaque jour un peu mieux. Il se sentait mieux aussi, retrouvait l’usage de la parole, remerciait Estelle pour ce sublime voyage.

Le dernier jour, lorsqu’Estelle mit fin au voyage, Emile lui dit : « Estelle, vous m’avez donné un bonheur inouï. J’ai voyagé avec ma plante verte en Inde. Maintenant, je dois poursuivre mon voyage, mais là où je vais, je ne  peux emporter ma plante. Je vous la donne, en souvenir de ces dix jours passés ensemble. Je n’ai rien d’autre à vous offrir, je peux juste vous dire encore une fois : Merci. »

Estelle prit la plante, embrassa Emile. Il ferma les yeux, et partit en voyage, seul cette fois, vers d’autres Cieux.


Selon les consignes de Kaléïdoplumes :
Choisissez votre aventure (tour du monde, voyage sur la lune ou au centre de la terre etc…)
Choisissez votre personnage
Choisissez un moyen de transport
Choisissez un compagnon de voyage (animal ou végétal)

Il ne vous reste plus qu’à raconter votre aventure en moins de 3000 caractères (espaces compris)

Méprisable



C’est un pervers, je n’ai que mépris pour lui. Il m’a fait passer mon examen oral, son assistant assis à côté de lui. Il était trop facile pour lui de poser des questions piège, d’affirmer que la réponse était fausse, alors qu’il était possible de la regarder des deux bouts de la lorgnette, que si elle était fausse selon un certain point de vue, elle était exacte de l’autre point de vue. Il faisait exprès de choisir des questions impliquant deux façons de voir les choses, pour avoir la joie de me contredire et de m’asséner une note médiocre. Méprisable procédé.
Texte écrit pour Kaléïdoplumes.
 

mardi 21 juin 2016

Tag du dragon

L'ébouriffée m'a tagguée... Ce que c'est que la célébrité, parfois je regrette l'anonymat. Malgré tout, vous reconnaîtrez que ce tag est parti d'un bon sentiment. L'ébouriffée s'est dit que puisque j'étais en prise avec la poussière, elle allait m'envoyer un gentil dragon, qui, d'un éternuement, allait dépoussiérer d'un coup toute la maison. Un dragon-aide ménagère, vous y croyez vous ?
 
Bref, que faut-il faire ?
Nominer les meilleurs commentateurs. Je n'ai pas bien compris si je devais sélectionner les meilleurs commentaires ou les commentateurs les plus fréquents. J'opterais pour les seconds pour ne pas créer de guerre des commentateurs de blog, mais il faudrait que je compte, et quand on aime, on ne compte pas. Il n'y aura donc pas de nominé, ou plutôt, tout le monde est nominé ! A vos plumes !
 
Il faut ensuite dire 5 choses sur soi, des choses inédites. C'est un peu difficile lorsqu'on a un blog de 5 ans d'âge, d'arriver à renouveler cet exercice.
 
- Mon désir le plus profond serait d'avoir un dragon-aide ménagère.
 
- J'aime aller à la déchetterie. Le personnel est tellement complaisant que j'ai le droit d'entrer dans le hangar en marche arrière pour vider mes mètres cubes de papier, et que j'ai à peine le temps de sortir de la voiture que le coffre de mon véhicule est vide.
 
- Je n'ai pas la main verte. Mais alors pas du tout. Les seules plantes qui ont du succès chez moi sont les cactus, parce que moins on y pense, mieux ils se portent.

- J'use sans abuser du tape-mouches. Je ne les supporte pas virevolter autour de moi. Depuis une heure, ce sont 3 mouches qui ont été occises, la quatrième voit arriver ses dernière minutes de vie.

- J'ai été déçue du dernier livre de Jean d'Ormesson : c'est un livre de politique, les 50 dernière années. Bof, comme détente après des examens, il y a plus plaisant !

Sur ce, n'ayant toujours pas de dragon-aide ménagère, je vais aller nettoyer ma cuisine moi-même.

 

lundi 20 juin 2016

Un tableau, une histoire (14)

Sur une idée de Lakievo

Anderson harry one-of-the-great-moments-of-your-life-your-marriage



La vieille dame se lève péniblement en entendant le facteur sonner à la porte. Elle attrape sa canne, marche à tous petits pas, comment pourrait-elle aller plus vite, fait un vœu pour que le facteur soit encore là lorsqu'elle ouvrira. Les facteurs sont si pressés de nos jours, pense-t-elle, lorsque j'étais jeune, ils entraient, buvaient un petit verre, racontait ce qu'ils avaient vu et entendu, et repartaient en direction d'un autre lieu à desservir. Actuellement ils sonnent comme des brutes, ont peu de patience, et s'en vont aussi vite qu'ils sont venus. Heureusement le facteur actuel est bienveillant, mais si c'est son remplaçant, je suis quitte à aller à la poste". Ce faisant, elle arrive à la porte, l'ouvre et reconnaît son facteur habituel si complaisant.
- Bonjour Madame Germaine, j'ai un colis pour vous.
- Un colis pour moi, mais je n'ai rien commandé.
- Vous voulez bien signer ici ?
 
Germaine signe, prend le colis, et rentre chez elle. Elle se dirige vers la salle à manger, pose le colis sur la table, va chercher un petit canif, et fend le scotch pour pouvoir ouvrir le carton. Elle découvre des pièces de puzzle. Elle ne peut retenir un sourire : "Qui donc peut m'envoyer un puzzle, et surtout sans le modèle ?" ajoute-t-elle en retournant la boîte. "Mais pourquoi n'y a-t-il pas d'expéditeur.  Voyons si je suis toujours aussi alerte !"
 
Germaine renverse les pièces sur la table, cherche "les bords", essaye de les assembler. Beaucoup de rose, du blanc, du vert. Voilà que le cadre est terminé. Elle trie alors ses morceaux en fonction des couleurs, commence par poser les roses. "Tiens, on dirait une robe". Elle poursuit patiemment son travail, poursuit avec les pièces bleues, puis les vertes, et soudain elle comprend : "Mais c'est la photo du mariage". Fébrilement elle remplit les espaces, soudain avec vivacité. Le soir est tombé depuis longtemps, Germaine a allumé les lampes, l'horloge sonne 2 heures.
 
Germaine contemple les visages. "Tante Adèle, quelle était drôle cette tante, et comme je l'aimais, toujours heureuse, toujours joyeuse, et pourtant la vie n'a pas été tendre avec elle. Tiens, Grand-papa, je l'appelais "le curieux", lui seul le savait. Il me faisait de gros yeux, mais je voyais bien son sourire caché sous sa moustache. A côté de lui, tante Héloïse. Quelle méchante femme. Toujours à critiquer, jamais contente. La pauvre, elle s'était construit une vie de désolation. Et là, au milieu, ma sœur chérie. Sa joie était totale. Elle avait rencontré un jeune homme tellement doux, tellement séduisant, tellement attentionné. Elle a vécu une vie exceptionnelle avec cet homme. Ils se sont aimés jusqu'au bout, après 74 ans de vie commune. Elle est morte la première, il ne lui a survécu que 5 heures. Ce que c'est que l'amour.
 
De tout ce tableau de gens heureux, il ne reste que moi. Forcément, j'étais la plus jeune. Bientôt je les rejoindrai tous, et nous nous retrouverons au paradis. J'ai hâte...
 
 

samedi 18 juin 2016

Où allez-vous ?

Mes examens se sont terminés, mais je ne vous ai pas tout raconté.

L'autre jour, j'attendais mon tour dans le couloir pour passer un examen oral. Lorsque le professeur est sorti, une petite boîte dans la main, avec le candidat qui me précédait, il m'a demandé de l'attendre 5 minutes.
 
- Puis-je vous accompagner ?
- En fait non... Je vais là où même le roi va seul.
- Oh, excusez-moi, je croyais que vous alliez fumer.
- Vous pouvez aller fumer.
- Mais moi je ne fume pas, habituellement j'accompagne les copines qui fument.
- Ah ! Vous vouliez papoter !
- C'est exactement ça.

Il est donc parti seul avec sa boîte de médicaments que j'avais pris pour un étui à cigarettes. J'étais hilare : on n'est pas gaffeuse depuis tant d'année sans avoir acquis un humour sur soi-même. Moi aussi je me fais beaucoup rire, il n'y pas que Monsieur Alphonse qui se marre !
 
 

La poussière


La maison s’est assoupie doucement. La poussière s’est lentement posée sur tous les objets qu’elle rencontrait sans faire de distinction quant aux lieux qu’elle choisissait. La pluie est venue tambouriner aux carreaux en tentant par tous moyens d’entrer en contact avec la poussière. Mais cette paresseuse a fait la sourde oreille. Elle s’est installée dans un matelas de plus en plus épais, s’est regroupée en moutons disharmonieux sous les meubles et les fauteuils, puis s’est échappée par petits groupes coquins profitant d’un courant d’air pour aller visiter le monde. Alphonsine en a terminé avec ses examens, la bataille va commencer.

 


Texte en 100 mots écrit pour Kaléïdoplumes.

jeudi 16 juin 2016

Les têtes



Elle ne dessinait que des têtes. Des têtes humaines bien sûr. Des têtes d’enfants, des têtes d’adultes, des têtes de vieillards. Indistinctement. Elle ne dessinait que des têtes. A tout moment, elle tenait un crayon dans ses mains, elle en avait toujours un dans son sac ou dans ses poches. En quelques lignes rapidement tracées, elle faisait naître une tête sous sa mine. Partout, sur la facturette de supermarché, une vieille enveloppe, des feuilles de brouillon, en marge d’une lettre. Parfois aussi, elle prenait une belle feuille au grammage épais… Puis elle emportait ses dessins et les enfermait dans un tiroir. Au début, elle les rangeait dans une petite boîte. Ensuite, elle les a mises dans un carton à chaussures, puis les a transférées dans une caisse en bois. Le jour est venu où la caisse est devenue trop petite à son tour.

Ce jour-là, elle est allée acheter une commode, et elle en a trouvé une, fort jolie chez son brocanteur habituel. C’était une commode bien pratique avec sa multitude de tiroirs. Le brocanteur, bien complaisant, l’a aidée à la transporter dans son petit appartement. Elle a admiré sa commode, l’a nettoyée, et a ouvert la fenêtre pour faire entrer le soleil dans sa chambre. Ensuite, elle a posé sa caisse sur un tabouret, a sorti les têtes une à une en réfléchissant à la manière de procéder : « Vais-je les classer par date, par taille, par thème, les filles d’un côté, les garçons de l’autre, ou les séparer en fonction de leurs âges ? » En attendant de trouver l’inspiration elle a sorti les papiers de sa caisse et les a alignés sur la commode. Elle en a fait des piles et finalement opté pour un classement selon le caractère des têtes : les doux, les rêveurs, les sévères et les méchants, les rieurs, les tristes, les laids et les beaux. Elle s’est trompée un peu, mais a estimé qu’un peu de fantaisie ne pouvait pas nuire au mode de classement.

Puis elle a eu envie d’une tasse de thé. Elle s’est rendue dans sa cuisine, et tout en mettant de l’eau à chauffer, elle a préparé une tasse, choisi un sachet de thé à la bergamote ainsi qu’un petit biscuit aux flocons d’avoine. Au moment d’entrer dans sa chambre, sa tasse de thé à la main, un violent coup de vent a fait se lever toutes les feuilles empilées sur sa commode. C’est un tourbillon de têtes qui se sont envolées dans sa chambre. Des grandes, des petites, des minuscules et des géantes, des comiques et des réfléchis, des sages et des austères, des frivoles et des gais, toutes ont virevolté ensemble en tous sens, puis se sont gonflées comme des ballons de baudruche et ont empli tout l’espace.

Elle s’est assise dans son fauteuil, ébahie, a posé son petit plateau de thé sur sa commode puis a observé la scène en silence. Les têtes se sont toutes mises à parler à la fois. Ca jacassait, ça discutait, ça disputait, ça bredouillait, ça ronchonnait, ça dissertait et ça s’égosillait, jusqu’à ce qu’une tête vénérable se soit détachée du lot et se soit installée dans un angle de la pièce à mi-hauteur. Elle a susurré « Tttt, ttt » tout doucement, et un grand silence s’est fait. Toutes les têtes se sont rangées en rang, les hommes au fond, les enfants devant, et les femmes entre les deux. Sur un clin d’œil du vieillard, le chœur s’est mis à chanter. Quelle apothéose ! Ce chant si beau et si doux a duré bien longtemps. Elle a bu son thé en écoutant avec délectation. Enfin, le silence a empli la pièce. Elle s’est réveillée, a ramassé les papiers qui jonchaient le sol, et les a classés dans les tiroirs de sa nouvelle commode.


Texte publié sur Kaléïdoplumes
 

Cinq ans

Cinq ans que je nourris mon blog. Toujours la même photo du chemin, un lieu que j'affectionne particulièrement, toujours la même présentation, la même couleur, le même titre aussi, je ne m'en lasse pas.
 
Cinq ans surtout que vous me lisez. Des lecteurs arrivent, d'autres repartent, certains se manifestent, d'autres lisent en toute discrétion. Vous êtes tous chers à mon cœur, mais il est vrai que de pouvoir faire connaissance plus en profondeur avec les uns et les autres crée des liens d'amitié très forte.
 
Merci à tous, j'ai toujours plaisir à écrire, vous me procurez beaucoup de bonheur !

Et comme aujourd'hui signe le dernier jour de mes examens, je vais enfin pouvoir renouer avec les articles de mon blog !
 

Attention, Alphonsine est de retour !!!


 

dimanche 5 juin 2016

Veille d'examens

Demain, c'est le début de la session d'examens. Trois oraux demain matin. Je n'en peux plus de réviser sans arrêt, je suis passée aux matières suivantes que je connais déjà. Bref, ce soir Monsieur Alphonse m'a fait le reproche attendu : "Tu ne m'as pas coupé les cheveux hier soir". Je lui ai fait une réponse qui m'a surprise moi-même : "Forcément, si tu m'avais promis une séance de cinéma, j'aurais sorti la tondeuse immédiatement".
 
Monsieur Alphonse a donc sorti la tondeuse et promit la séance "Retour chez ma mère". J'ai tondu, et nous sommes partis.
 
Bon, à présent il faut penser aux choses sérieuses qui vont durer une douzaine de jours. Ce problème est toujours crucial avant les examens oraux : Que vais-je mettre pour mes oraux ?
 
 

jeudi 2 juin 2016

Commentaire

Lors de mes examens de la semaine dernière, je suis entrée dans le bureau du professeur pour mon examen oral. Il me fait m'installer et a longuement bidouillé je ne sais quoi. Très spontanément (et mettons cela sur le compte de la fatigue), je m'écrie : "Et bien, allons-y, commençons". Il me regarde avec surprise et étonnement : "Faisons comme VOUS voulez".
 
Je me suis empressée de lui présenter mes excuses en riant, parce que j'ai le rire facile. Sur ce, il me dévisage et s'exclame "Vous êtes drôle".
 
En rentrant, j'ai raconté cette anecdote à Monsieur Alphonse qui m'a dit bien simplement : "Moi je sais que tu es drôle, ça fait 26 ans que je me marre".